2024 : Evolution du droit à l'image des enfants sur internet

Le 06 février 2024 les députés ont voté à l'unanimité une nouvelle loi concernant le droit à l'image des enfants sur internet. NDP Avocats a déjà traité cette thématique en avril 2021 avec : "Photos & réseaux sociaux : quid de l'autorité parentale des couples séparés ?" ... Mais aussi, et plus précisément, en mai 2021 avec "le droit à l'image et à l'oubli des mineurs sur les réseaux sociaux" . Voilà pourquoi, notre cabinet d'avocats en droit de la famille vous explique ce qu'il faut retenir de cette nouvelle loi.

L'article 371-1 du code civil

"En matière d'autorité parentale, il y a un article qui fait référence" explique Maître Debeauce. "C'est l'article 371-1 du code civil". Voici ce qu'il dit, dans sa version avant la Loi du 6 février 2024 :

"L'autorité parentale est un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l'intérêt de l'enfant. Elle appartient aux parents jusqu'à la majorité ou l'émancipation de l'enfant pour le protéger dans sa sécurité, sa santé et sa moralité, pour assurer son éducation et permettre son développement, dans le respect dû à sa personne. L'autorité parentale s'exerce sans violences physiques ou psychologiques. Les parents associent l'enfant aux décisions qui le concernent, selon son âge et son degré de maturité".

C’est cet article qui vient d’être modifié pour introduire la notion de droit à la vie privée et de droit à l’image de l’enfant sur laquelle les parents ont l’obligation de veiller au titre de leur autorité parentale.

Pourquoi une nouvelle loi sur le droit à l'image des enfants ?

"Ainsi, on pourrait s'interroger sur l'utilité d'une telle nouvelle loi" déclare Maître Debeauce. "En fait, cette loi récemment adoptée vient renforcer un dispositif jurisprudentiel déjà existant... Car elle introduit la notion de vie privée de l'enfant. Et ça, ça change beaucoup de choses. En l'occurrence, cela permet de faire comprendre aux parents (ou à l’un deux en cas de séparation) qu'ils ne disposent pas d'un droit absolu sur l'image de leur enfant" .

Objectifs de cette loi

Les objectifs de cette loi sont triples.

1 - Assainir les relations entre les parents

L'objectif de ce texte est de combler un vide juridique. Désormais, si les parents sont séparés et que l'un ne souhaite pas que l'autre diffuse des photos sur internet de son enfant, il peut le lui interdire. Avant, cette interdiction résultait de la seule décision d’un Juge. Depuis le 06 février : c'est la loi qui rappelle la règle !

C'est d'ailleurs ce que dit l'article 3 de cette loi : "Il peut également, en cas de désaccord entre les parents sur l’exercice du droit à l’image de l’enfant, interdire à l’un des parents de diffuser tout contenu relatif à l’enfant sans l’autorisation de l’autre parent" .

Nous évoquions déjà en avril 2021 un exemple de jurisprudence à travers un arrêt de la Cour d'Appel de Paris de février 2017 qui ordonnait à un père :

  • "De cesser de publier directement ou par tout tiers sur le site facebook tout document, commentaire, photographie concernant les enfants sans autorisation de la mère.

  • De supprimer tous les commentaires et photographies des enfants déjà publiés, sous astreinte de 250 euros par infraction constatée".

2 - Eviter les dérives

L'autre objectif de cette loi est de protéger les enfants en cas de manquement des parents. L'article 4 de cette loi précise : "lorsque la diffusion de l’image de l’enfant par ses parents porte gravement atteinte à la dignité ou à l’intégrité morale de celui‑ci, le particulier, l’établissement ou le service départemental de l’aide sociale à l’enfance qui a recueilli l’enfant ou un membre de la famille peut également saisir le juge aux fins de se faire déléguer l’exercice du droit à l’image de l’enfant" .
Cet article vise notamment le droit à l'image des enfants influenceurs sur les réseaux sociaux. "Parfois ce sont les parents qui s'engouffrent dans une course aux likes et aux partages au détriment de l'intérêt et de la vie privée de l'enfant" fait remarquer notre avocat en droit de la famille.

3 - Responsabiliser les parents

Enfin, l'autre objectif selon le député Renaissance Bruno Studer qui est à l'origine de cette loi est de "responsabiliser les parents" . En débat à l'Assemblée nationale, il déclarait : "Aujourd’hui, plus de 300 millions de photographies sont diffusées chaque jour sur les réseaux sociaux tandis qu’en 2015, Facebook hébergeait déjà plus de 250 milliards de photographies. En moyenne, avant l’âge de 13 ans, un enfant apparaît sur 1 300 photographies en ligne...Selon une étude récente, 50 % des photographies qui s’échangent sur les forums pédopornographiques ont été initialement publiées par les parents sur les réseaux sociaux" .

L'avis de NDP Avocats

"Cette loi vient clarifier, renforcer ce qui n'était jusqu'à aujourd'hui qu'une jurisprudence. Quand tout va bien dans un couple : il n'y a pas de débat (quoi que parfois les deux parents devraient s’interroger). En revanche, quand ce n'est pas le cas, cette loi vient renforcer les droits de celui qui s'oppose à ce que des photos de son enfant soient mises en ligne. C'est donc une bonne chose ! Cela envoie un message aux parents que leur devoir de protection s'étend désormais aux réseaux sociaux et au web d'une manière générale" .